Votre rôle de manager est avant tout un rôle relationnel, avec vos collaborateurs, vos équipiers-projet, les contributeurs de vos missions transversales, vos collègues, votre hiérarchie, vos clients… Or, au fil du temps et des expériences, nous élaborons tous des comportements réflexes qui sont susceptibles d’entraver la qualité de nos communications.
Des comportements réflexes aux... biais personnels de communication
Au départ, Ces comportements se sont manifestés dans des situations relationnelles où il était justifié de contourner l’obstacle. Les raisons en étaient alors objectives : éviter un conflit stérile, maitriser ses émotions, garder le contrôle d’une situation…Ces comportements ont dans ces cas-là démontré leur efficacité.
Par habitude, ces réponses de protection personnelle ont pu s’ancrer et devenir réflexes : leur rôle initial (nous défendre, nous protéger en cas de situation de communication compliquée ou délicate) est devenu un "biais personnel de communication", que nous utilisons inconsciemment, a priori, de façon quasi automatique et donc inappropriée.
Ces biais sont observables au travers de signaux subtils : il ne s'agit pas d'un refus explicite de communiquer-on ne verbalise pas le fait que l’on ne souhaite pas être en relation avec notre interlocuteur-mais la façon dont on communique induit une relation incomplète et inefficace.
Les 8 F.A.C.T.E.U.R.S de risque
Voici la description de ces 8 facteurs, ou comment être certain de couper son interlocuteur dans son élan :
F comme flou
Vous n’avez pas pour habitude de donner toutes les informations sur un sujet, vous préférez vous réserver une marge de manœuvre au cas où les choses évolueraient et quel qu’en soit le sens, et puis cela vous laisse la possibilité de changer d’avis…
Ce comportement induit chez l’autre une impression vague de trouble, le ressenti que tout n’a pas été dit au travers de petites phrases comme : "à ce stade, je ne peux tout évoquer, des facteurs extérieurs m’empêchent d’être plus clair avec toi…". Et votre interlocuteur de rester sur l'impression que, si tout n’est pas dit, c’est que des événements graves se préparent ou que la confiance n’est pas là.
A comme autocentré
Vous pensez écouter, mais en fait vous avez tendance à revenir sans cesse à vos sujets, à ce qui vous intéresse ou vous préoccupe, quoique vous dise votre interlocuteur, vous ramenez la conversation à votre sujet… voire à vous-même.
Par exemple : "oui, je comprends ton problème avec ce client, mais tu sais on peut trouver des solutions à tout. Il m’est arrivé de devoir relancer 10 fois le même fournisseur jusqu’à obtenir exactement ce que voulais, et je suis parvenu à mes fins !"
Dans ce cas, et si l’interaction est répétée, votre collaborateur peut en tirer la conclusion que vous n’êtes pas en mesure de vous intéresser à son sujet, et qu’il aurait intérêt à se débrouiller seul. Le risque pour vous, est que l’on ne vous sollicite plus en tant que manager qui soutient, et accompagne ses équipes dans leur recherche de solutions.
C comme condescendant
Vous manifestez peu d’intérêt pour la demande relationnelle que vous fait votre interlocuteur : vous montrez que le sujet, voire que la personne, est mineur pour vous. Dans cette configuration, soit vous n’avez pas le temps, soit le sujet ne vous intéresse vraiment pas, ou pas à ce moment-là. Certes, vous répondez, mais en montrant votre désintérêt. Vous dites, sur un ton détaché : "si cela est important pour toi… s’il le faut vraiment…si tu veux absolument aborder ce sujet, je trouverai bien 5mn…"
Si vous vous reconnaissez dans ce mode de fonctionnement, obligez-vous à considérer la valeur de votre interlocuteur et le besoin qu’il exprime au travers de sa demande. Sinon, vous risquez d’être perçu comme un manager à la limite d’une attitude de mépris envers ses équipes.
T comme terne
Un collaborateur vous sollicite, exprime son besoin de parler avec vous et… vous traitez la demande comme un non-événement, vous tergiversez, reportez… Les phrases repères sont ici : "oui, pourquoi pas, à l’occasion, une autre fois…". Vous ne vous engagez pas vraiment dans la relation, c’est comme si la demande d’interaction n’avait pas eu lieu.
Finalement, vous risquez de laisser l’autre à sa propre interprétation, avec la perception d’une forme d’indifférence au besoin qu’il a exprimé.
E comme énervé
Vous montrez tant d’enthousiasme, voire d’excitation, à une demande de communication que c’est votre réactivité qui peut vous jouer des tours. Vous prenez toute la place et votre réaction émotionnelle prend le pas sur vos capacités à analyser, considérer ce qui vous est dit. Ce comportement se traduit par une prise d’espace physique : vous bougez beaucoup, votre enthousiasme est porté par des mots comme "c’est super, c’est génial, tu prends des risques toi, il faut absolument y aller" ! Ce comportement un peu « Zébulon », peut casser la communication car il induit un manque d’écoute, voire du jugement en filigrane !
Si vous vous reconnaissez dans ce portrait : apprenez à utiliser les silences, à prendre une respiration avant toute réaction, et à vous poser. Sinon, votre interlocuteur peut soit douter de la pertinence de sa proposition, soit se sentir démuni face à votre trop forte présence.
U comme unilatéral
Votre pensée reste dans un fonctionnement en boucle, qui s’autoalimente de vos croyances sur ce qu’il est bon de faire ou pas et vous ne laissez pas s’exprimer les visions de l’autre. Il vous est difficile d’intégrer un autre mode raisonnement, une autre opinion. Pour l’éviter, vous répétez votre façon de voir, sans la faire évoluer ou sans considérer l’intérêt qu’un autre angle de vue aurait pour vous. Les phrases repères commencent par : "moi je pense que, je considère que, j’ai fait ceci…".
On peut avoir une impression de dialogue qui ne reflète en fait que 2 monologues… Par exemple : "oui, ce que tu me dis là de ta difficulté avec ce client me rappelle lorsque, il y a 10 ans j’avais dû gérer un problème équivalent, mais j’avais trouvé comment faire…".
Si cette description vous parle, obligez-vous à écouter jusqu’au bout en vous taisant, avant de vous autoriser la moindre intervention.
R comme rigide
Vous répondez par " oui " ou par " non ", en général plutôt non, sans autre forme d’explication ou de sens. Vous n’aimez pas perdre votre temps, vous vous considérez vous-même comme rapide, efficace et fort face aux difficultés. Vous ne pensez pas utile d’expliciter votre pensée, votre interlocuteur va s’aligner car votre façon de voir est la bonne… Répondre, de façon abrupte, par " oui " ou par " non ", est une façon très efficace de couper court aux propositions créatives, aux suggestions de fond, et remises en questions qui pourraient être utiles.
Si vous vous reconnaissez dans ce portrait, travaillez à vous contraindre à l’écoute attentive, laissez l’autre aller au bout de son idée, argumenter, et répondez oui ou non ensuite, avec un petit plus d’explication : "oui ou non car…" , "oui ou non pour la raison suivante…". Vous gagnerez du temps en compréhension de la demande sur le long terme.
S comme soucieux
Vous vous montrez préoccupé et par conséquent êtes peu attentif. Vos responsabilités, pèsent sur vos épaules et cela se voit, toute demande d’interaction peut être prise comme un dérangement, on risque de ne plus oser aller vers vous, trop de choses à régler, trop de préoccupations… Un conseil dans ce cas, prévoyez dans votre organisation du temps des moments consacrés à l’écoute et au dialogue avec vos collaborateurs, hors tout autre champ de préoccupation.
Il est possible que vous vous reconnaissiez dans un ou plusieurs de ces F.A.C.T.E.U.R.S de risque. Vous pouvez identifier que vous en pratiquez souvent ou pas, les mêmes ou pas, dans certaines situations.
La prise de conscience de ces mécanismes doit vous permettre en situation, de prendre du recul, de vous auto-observer et de repérer quels sont vos propres biais.