Le leadership féminin : pourquoi il faut s'y intéresser ?
Malgré l’émergence de figures féminines du leadership, force est de constater que le leadership demeure une construction sociale attachée à des modèles masculins. Mais chacun - et surtout chacune - peut faire évoluer la situation. Éléments de réflexion sur le leadership féminin.
- Pour quelles raisons parler du leadership féminin ?
- Qu’est-ce que le leadership équilibré ?
- Pourquoi est-ce si difficile de citer des exemples de femmes leaders ?
- Quels sont les obstacles pour le développement de son leadership quand on est une femme ?
- Le leadership au féminin est-il synonyme d’empowerment ?
- Quel est l’intérêt de se former au leadership féminin ?
Pour quelles raisons parler du leadership féminin ?
« On en parle, déjà, parce que cela reste un sujet ! ». Les chiffres sont têtus et Annette Chazoule, réaliste. « En 2023, le plafond de verre et les écarts de salaires sont toujours là », constate notre experte, manager de l’offre Management et Changement chez Cegos. En vertu de la Loi Rixain notamment, toute entreprise de plus de 1 000 salariés devra compter au moins 30 % de femmes dans ses instances dirigeantes en 2026 (et 40 % en 2029). Or, en 2023, selon l’Institut français des administrateurs (IFA), plus de 60 % des entreprises françaises ne sont pas encore dans les clous. Et 27 % comptent toujours moins de 20 % de femmes dans leur instance dirigeante !
« S’intéresser au leadership féminin, c’est donc aller dans le sens de la loi et d’une nécessaire dynamique de responsabilité sociale de l’entreprise », poursuit notre spécialiste. D’un point de vue sociétal, il reste des progrès à faire aussi. « Le mouvement est amorcé : les populations de jeunes femmes sont de plus en plus formées, dans des domaines diversifiés. Et il est reconnu que les performances dans les études initiales n’ont rien à envier à celles des jeunes hommes. Ces jeunes femmes qualifiées peuvent prétendre à une réelle ambition, viser des postes à responsabilité et développer leur leadership. »
Autre raison de s’intéresser au sujet : c’est payant. Vingt ans après, l’étude menée par l’association Catalyst, en 2004, demeure une référence et démontre une corrélation entre la présence de femmes dans les équipes de direction et laperformance financière de l’entreprise. « D’autres études l’ont montré depuis, abonde Annette Chazoule. La féminisation des équipes et la diversité en général profitent à tous. Mais ce qui est positif, c’est que les organisations prennent de plus en plus conscience de l’avantage à mélanger les profils masculins et féminins dans leur ligne hiérarchique. »
Qu’est-ce que le leadership équilibré ?
Pour parvenir à cette diversité de profils masculins et féminins dans les lignes hiérarchiques, un modèle a fait ses preuves : le leadership équilibré. « L’idée est desortir des stéréotypes qui enferment les femmes et qui consistent à dire qu’une femme leader va développer des qualités faussement innées comme l’écoute ou l’empathie par exemple. » Autrement dit, il n’existe pas de façon typiquement féminine ou particulièrement masculine de diriger. Il existe simplement une palette de qualités que l’on trouve chez les deux sexes.
« Une femme leader s’appuie sur les mêmes qualités requises chez un homme leader, rappelle Annette Chazoule. L’authenticité est la première qui revient dans les études. Viennent ensuite savoir dire la vérité et le courage de faire changer les choses. Un leader doit aussi manifester une capacité à agir et à faire face aux conflits. Et, surtout, il doit porter des convictions. » Dans cet esprit, être une femme leader ne relève pas de qualités différenciantes rapport aux hommes, mais davantage de la capacité à combiner ces qualités et à s’adapter à son environnement.
Pour notre experte, être leader aujourd’hui impose une posture adaptative et un juste équilibre entre autorité, influence et impact personnel.« Comparer leadership féminin et masculin est un biais de jugement, basé sur des stéréotypes.» rappelle Annette Chazoule. À chacun, simplement, de puiser dans son parcours, sa personnalité et sa connaissance de soi-même pour agir en leader. « De plus, on sait que les plus jeunes générations (les 20-35 ans) accordent peu d’importance au fait d’être dirigées par un homme ou une femme. Elles veulent juste qu’un manager soit légitime et compétent ! »
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Pourquoi est-ce si difficile de citer des exemples de femmes leaders ?
Les transformations sont réelles, même s’il est encore difficile de citer des exemples de femmes leaders. « Tout simplement parce qu’il y en a encore peu », tranche Annette Chazoule.
Pour notre spécialiste, les temps changent, mais on sait que les évolutions sociétales prennent du temps. Ce sont les plus jeunes générations qui sont des leaders potentielles. Encore faudra-t-il que les équilibres vie personnelle et vie professionnelle soient plus facilitants et mieux répartis. Par rapport à une dizaine d’années on observe que l’arrivée d’une femme à la tête d’une organisation, d’une entreprise, d’un syndicat ne fait plus débat. Le leadership d’une femme n’est plus questionné a priori.
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Quels sont les obstacles pour le développement de son leadership quand on est une femme ?
Alors, pour quelles raisons, malgré les évolutions en cours, les femmes restent peu visibles ? « Un obstacle important sur lequel il faut travailler demeure l’autocensure liée à une hésitation sur sa légitimité et ses compétences pour assumer un rôle de leader », indique Annette Chazoule. C’est un sujet de travail sur la confiance en soi et l’assertivité : apprendre à saisir une opportunité d’une promotion avant de se questionner sur ses capacités.
Il y a également une dimension à prendre en compte : les évolutions sociétales sont favorables, reste à faire bouger les lignes concernant la responsabilité encore largement féminine de l’organisation de la vie familiale et de la charge mentale que cela implique. Lorsqu’une femme travaille en réseau sur son leadership et donc sa capacité à s’affirmer et influencer, cette préoccupation revient régulièrement. Pour Annette Chazoule, les préjugés, parfois inconscients, sont encore partout… y compris parfois chez les femmes elles-mêmes.
Le leadership au féminin est-il synonyme d’empowerment ?
Pour réussir à s’imposer, malgré soi et les autres, Annette Chazoule souligne l’intérêt de l’empowerment. Ce concept, né aux États-Unis au début du XXe siècle dans un contexte de luttes sociales, désigne la prise de pouvoir par les individus pour eux-mêmes, sans attendre une permission extérieure. « C’est une prise de pouvoir que l’on va opéreren se libérant des idées reçues. »
Pour autant, les femmes - comme les hommes d’ailleurs - réussiront rarement seules. « Comme leurs pairs, elles ont besoin de développer des réseaux. Pour avoir des modèles, travailler sur les difficultés qu’elles rencontrent et pour les aider dans le développement de leur parcours professionnel. « L’enjeu est dans le fait de "se donner l’autorisation" à prendre du temps pour faire savoir ce que l’on fait, se faire connaitre et s’impliquer dans des réseaux professionnels porteurs pour sa notoriété et sa carrière.
Quel est l’intérêt de se former au leadership féminin ?
Mais cela aussi peut changer. En se formant justement. « Pour moi, se former, c’est un point de départ, conclut Annette Chazoule. C’est l’occasion de dépasser ses freins personnels, de repérer ses points forts, de les développer au travers de formations continues qualifiantes. C’est aussi se libérer des éléments de stress comme l’autocensure et l’illusion de perfection ou d’acceptation par tous ses interlocuteurs. En parallèle il est utile de prendre conscience de l’environnement dans lequelon évolue, car certaines entreprises ou organisations, sont plus ou moins favorables à l’émergence de leaders féminins, même sur du middle management. »
Quant aux employeurs, ils ont aussi tout intérêt à voir ces talents se développer et à les encourager, via des réseaux dans l’entreprise ou du mentorat, pour faire bouger les lignes. « Lors de nos formations sur le leadership féminin, on accompagne les participantes dans un parcours de confiance en soi et d’assertivité. On les incite également à assumer leurs points forts ainsi que tout ce qui incarne leur singularité. Et pour les organisations, accompagner les femmes dans leur évolution et leurs projets, c’est l’occasion de participer aux évolutions de fond sociétales et responsables. »