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A la recherche des causes dans les projets

Thierry DefendiConsultant senior
Analyse des causes

Lors d’un précédent billet sur l’analyse de situation, nous avions identifié l’utilité de s’intéresser aux causes afin de décider des actions éventuelles à entreprendre (outil 3C).

L’objet du présent billet est d’aborder la méthodologie de recherche et de ciblage des causes d’une situation que l’on souhaite voir évoluer au regard de ses conséquences avérées ou potentielles.

Cette problématique se présente à tous les stades du cycle de vie des projets :

  • Durant la phase d’avant-projet, un diagnostic de situation va amener à identifier les causes de la situation actuelle, afin de cibler les besoins d’évolution et donc un éventuel nouveau projet à lancer. Il est à noter ici que cette analyse peut amener aussi à décider d’engager une action de type progrès continu qui ne justifiera pas l’organisation et le lancement d’un projet spécifique (le processus d’amélioration continue est trop souvent assimilé, à tort, au mode projet).
  • Durant la phase de réalisation d’un projet, la sécurisation des objectifs à atteindre amène à identifier les évènements qui pourraient menacer leur atteinte, c’est-à-dire les risques opérationnels du projet (à ne pas confondre avec les risques stratégiques du projet c’est-à-dire les risques à faire ou ne pas faire le projet, autrement dit les enjeux).
  • Durant la phase de run, la sécurisation des fonctionnements et des résultats opérationnels amène à identifier les causes des dysfonctionnements avérés ou potentiels.

Toute situation est le produit de multiples facteurs. Les mêmes causes amenant les mêmes effets, si l’on veut qu’une situation évolue, il faut intervenir au niveau des causes qui l’induisent. La problématique de traitement des causes est donc dans leur identification et le ciblage des principales sur lesquelles concentrer les efforts.

Plusieurs méthodes et outils peuvent être mis en œuvre à cette fin, par exemple :

  • Recherche de causes : « diagramme d’Ishikawa », « 5 pourquoi » …
  • Ciblage des causes principales : « Loi de Pareto ou 20/80 », « AMDEC » …

Le « diagramme d’Ishikawa »

Ishikawa

Le diagramme d’Ishikawa est basé sur une distinction à priori des différents types de causes. Pour une activité donnée, ces dernières peuvent en effet relever de « défauts » de :

  • Méthodes : modalités de mise en œuvre de l’activité.
  • Main d’œuvre : « qualité » des ressources humaines mises en œuvre (information, compétences, motivation …).
  • Matériel : « qualité » des ressources matérielles mises en œuvre (adaptation des outils aux besoins de l’activité)
  • Moyens : dimensionnement des ressources, humaines, matérielles et financières.
  • Matière : produits ou informations d’entrée de l’activité.
  • Milieu : environnement de l’activité et interfaces avec les autres activités en relation.

Cette distinction des typologies de causes a pour but d’établir un inventaire exhaustif des causes et non une simple classification des causes. Autrement dit, cette classification est ici un moyen et non un but. Elle a vocation à inciter à rechercher des causes dans des domaines auxquels on pourrait ne pas penser. Ceci se vérifie en particulier pour les causes de type « Matière » et « Milieu ».

Les causes liés au « Management », qui donnent lieu dans certaines version de cet outil à une catégorie spécifique peuvent être recherchées dans le cadre des six familles précédentes.

Les lecteurs auront remarqué que l’outil historique 5M est ici étendu à 6M, afin de distinguer les défauts liés aux ressources matérielles de ceux liés aux ressources humaines.

Comme tout outil de type « check list », cet outil n’est qu’une proposition de catégorisation des causes. Suivant les situations analysées, d’autres segmentations peuvent être appliquées en fonction des caractéristiques propres de la situation et de la problématique concernée.

Le formalisme historique de cet outil, inventé par le chimiste japonais Kaoru Ishikawa (1915-1989), habituellement présenté sous forme d’une arête de poisson, n’a qu’une utilité accessoire.

Les « 5 pourquoi »

Par construction, l’outil précédent permet d’identifier des causes directes d’une situation, ou causes de premier niveau. Elles sont la réponse à la question « pourquoi » la situation analysée est ce qu’elle est. Or, chacune des causes identifiées a elle-même une ou plusieurs causes.

L’identification des causes profondes peut être réalisée en reposant plusieurs fois la question « pourquoi », afin de remonter aux causes « racines ».

Par ailleurs, plus on remonte aux causes profondes et plus difficile est l’identification des causes. On connaît tous l’embarras dans lequel peut nous mettre un enfant en nous posant la question « pourquoi » de manière répétée. Par ailleurs, cette recherche amenant mécaniquement une identification exponentielle des causes, l’outil « 5 pourquoi » est à appliquer dans son principe et non à la lettre.

Historiquement cet outil a été inventé par l’ingénieur industriel japonais Taiichi Ohno (1912-1990)

Les « 20 x 80 »

Comme nous venons de le voir avec les outils précédents, de nombreuses causes peuvent être identifiées. Or, toutes les causes ne contribuent pas également à une situation : une loi statistique dit que 20 % des causes amènent 80% des conséquences. C’est d’ailleurs une loi plus générale découverte par le sociologue et économiste italien Vilfredo Pareto (1848-1923).

Le principe de cet outil est donc de cibler parmi toutes les causes identifiées celles qui participent le plus à la situation en objet.

L' « AMDEC »

Les causes d’une situation peuvent être distinguées en deux catégories : celles qui sont avérées et établies (certaines) et celles qui ont un caractère probabiliste, c’est-à-dire liées à la survenue possible mais non certaine d’un évènement particulier.

Dans ce dernier cas, la cause est appelée un « risque ».

L’évaluation d’un risque est appelé « criticité » du risque et cette dernière est évaluée sur la base de deux critères complémentaires :

  • La Gravité : conséquences, impacts …
  • L’Occurrence : fréquence, probabilité …

Les deux critères étant indépendants, la valeur de la criticité est le produit de la gravité et de l’occurrence.

En fonction de l’expertise sur la situation en objet, l’évaluation de la gravité et de l’occurrence peut être simplifiée par l’adoption d’échelles simplifiées à 3, 4 ou 5 niveaux et le positionnement des risques sur une matrice croisant la gravité et l’occurrence.

L’avantage de cette dernière approche visuelle et d’inciter les protagonistes à argumenter leurs points de vue et à ne pas se limiter à une stricte cotation, toujours discutable.

L’évaluation d’un risque étant faite à instant t, certaines « parades » peuvent déjà exister. Lorsque l’on évalue un risque, il est donc utile de faire l’état des moyens de détection et de couverture (dispositifs en place pour faire face à l’avènement du risque).

Les risques dont la criticité est à un niveau inacceptable doivent donner lieu à l’identification de plans d’actions destinés à ramener leur criticité à un niveau acceptable.

La méthode AMDEC (Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et le leur Criticité) a été élaborée par l’armée américaine en 1940.

Les enjeux et limites de ces outils

Tous les outils et méthodes présentés ici se prêtent parfaitement à une application en groupes de travail et sont un excellent moyen d’allier la concertation et l’ouverture au raisonnement et à la rigueur.

L’aspect rationnel et logique de chaque outil et méthode ne doit pas faire oublier que les choix finaux relèvent du management et ne sont pas juste le produit « mécanique » d’un mode d’emploi. Par exemple, le choix du seuil de criticité évoqué plus haut est un choix politique au sens managérial du terme. En effet, il n’est pas le produit d’un raisonnement mais l’expression d’un seuil de sensibilité aux risques, qui est discutable tant qu’il n’est pas fixé par l’encadrement.

Et vous, utilisez-vous ces outils dans vos projets ?

Ecrit par

Thierry Defendi

Consultant Cegos en conseil et formation, Thierry Defendi intervient pour tous les secteurs d’activités dans les domaines suivants : management de projets, conduite des changements, organisation et performance.
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