Diversité : Managers, nettoyez vos filtres !
Les résultats du baromètre Cegos-Paris Dauphine sur les pratiques de la diversité qui vient de paraître sont édifiants : il reste beaucoup à faire à tous les niveaux, y compris au niveau managérial. Comment les managers peuvent ils aborder cette question ? La réalité de la diversité perçue par un manager n'a pas d'existence propre. Elle est le fruit d’une élaboration intérieure qu’il projette à l’extérieur à travers ses filtres de perception. (Concept issu de la Programmation neurolinguistique (P.N.L) développé en particulier par Alfred Korbzyski et Paul Wazlawick.)
Vous avez dit « filtres de perception » ?
La Programmation Neuro Linguistique (P.N.L) et la Gestalt théorie ont mis en évidence que :
- C’est parce que nous projetons sur le monde des formes connues qu'il nous est possible de le comprendre. Percevoir, c'est reconnaître une forme.
- Nous avons tendance à voir ce que nous espérons voir. Nous ne reconnaissons que ce que nous connaissons déjà. Nous validons sans cesse nos représentations.
- Nous avons tendance à percevoir ce que notre éducation, notre culture nous a préparé à voir, et nous faisons en permanence une lecture de notre environnement par rapport à nos intérêts et à nos buts du moment présent.
Ainsi, confronté à un collaborateur, chaque manager n'en abstrait qu'un certain nombre de caractéristiques qui sont différentes pour chacun d’entre nous : Chacun a sa propre paire de « lunettes à abstraire » qui lui est personnelle.
Managers, voici quelques pistes pour maitriser ces biais cognitifs naturels :
Avoir conscience de ses filtres
- Considérer la vie comme une succession de nouveautés : un évènement (et un collaborateur) change tout le temps. Un manager retrouve après plusieurs années un collaborateur avec lequel il a déjà travaillé. Il est surpris de ne pas retrouver le « même » collaborateur : les relations sont plus difficiles qu’auparavant. A chaque seconde se produit un nouvel événement. Si je rencontre quelqu'un aujourd'hui, c'est un événement. Si je le rencontre demain, c'est un nouvel événement. Si je le revois dans dix ans ce sera encore un nouvel événement.
- Prendre en compte les notions d'identification et de "Similitudes/ Différences" : il peut y avoir autant de ressemblances que de différences dans ces nouvelles rencontres. Le problème, c'est que nous privilégions souvent les similitudes et nous ne recherchons pas systématiquement les différences. Ces données constituent un filtre au travers duquel nous allons sélectionner les informations qui sont conformes aux données préalablement emmagasinées. Le risque est qu'elles peuvent nous amener à adopter une attitude qui va provoquer chez l'autre le comportement que l'on attend : c’est la prophétie auto réalisatrice ou Effet Pygmalion.
Si, quand le manager rencontre l’un collaborateur, il se contente de dire : "il a 50 ans ! » ou « il a 25 ans !" ou encore « il n’est pas motivé » ou encore « il n’a pas l’air très en forme », cela veut dire qu’il l’a étiqueté une fois pour toutes. À chaque fois qu’il verra ce collaborateur, il cherchera au mieux les similitudes avec les caractéristiques de l'étiquette qu’il lui a attribuée. L’habitude et l’automatisme font que nous ne nous donnons plus le recul de l’observation.
Dans notre rôle de manager nous nous devons de lutter contre ce « mouvement naturel » et revisiter régulièrement nos croyances en les confrontant aux caractéristiques de la réalité :
- Avoir compris et accepté que chacun d'entre nous perçoit une même situation de façon différente.
- Savoir que les personnes n'ont pas conscience de ce phénomène. Du coup, chacun est persuadé que sa vision de la réalité est la réalité et qu'elle est la même pour tout le monde et que si ce n'est pas le cas, c'est que les autres ont des problèmes.
- Intégrer le fait que nos comportements découlent directement d’une représentation subjective de la réalité. Si nous avons une vision erronée, alors nous développerons un comportement inadapté. Si nous n'avons qu'un seul mode de pensée, qu'une vision trop étroite (un seul point de vue), qu'une seule grille de lecture, nous n’aurons qu'un seul type de comportement à notre disposition.
- La zone de risque est là : si le manager n'a à sa disposition qu'un seul type de comportement disponible, il devient manipulable, prévisible et peu efficace. Donc, à vous d’être vigilants en partant de vos propres représentations de la réalité et en vous exerçant à les revisiter par des prises de conscience volontaires !
Nettoyer ses filtres de perception
Pour éviter les identifications erronées, la sémantique générale invite le manager rechercher en permanence les différences. (Théorisée par Alfred Korzybski dans « Science and Sanity, an introduction to non aristotelian systems and general semantics”.)
Le manager qui a la plus grande palette de comportements à sa disposition et la capacité d'utiliser celui qui est adapté à la situation apporte une réponse adéquate. Il est alors plus flexible, donc plus efficace.
Pour réduire l'écart entre la réalité et ce qu’il perçoit, le manager a donc intérêt à :
1) Être conscient qu’il accède aux situations à travers le prisme de ses perceptions.
- Que le fait que percevoir une chose ne lui donne pas automatiquement accès à la vérité sur cette chose.
- Qu’il a des filtres et des mécanismes qui influencent, limitent et déforment l'information qu’il collecte.
2) Identifier ses déformations systématiques générées par ses filtres et mécanismes.
3) Corriger en conséquence ses perceptions.
- Distinguer les faits observables, les interprétations de ces faits (inférences) et les jugements de valeurs (énoncés évaluatifs).
- Être le plus près possible au niveau de l'observation : décrire, quantifier, personnifier, clarifier, dater, indexer.
- Éviter de « cataloguer » ses collaborateurs ou de s’identifier à eux.
Bon nettoyage !
>>Enquête Cegos / Dauphine sur "Les pratiques de la discrimination et de la diversité en entreprise"